Le transfert de Germain Katanga à la Haye

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Germain Katanga, commandant présumé de la Force de résistance patriotique en Ituri (FRPI), a été transféré à La Haye le 17 octobre 2007, marquant ainsi la deuxième affaire de la CPI en RDC. Crédit : ANP/Robert Vos

Le 17 octobre 2007, la CPI recevait dans sa prison de Scheveningen, à La Haye, son second détenu, le commandant Germain Katanga, également connu sous le nom de « Simba ». Le commandant présumé de la Force de résistance patriotique en Ituri (FRPI), la branche armée de la milice Front nationaliste et intégrationniste (FNI), venait d’être remis par les autorités congolaises à la CPI. Son arrestation en mars 2005 faisait suite à une attaque menée en Ituri contre les Casques bleus de la MONUC le 25 février 2005, au cours de laquelle neuf soldats de maintien de la paix ont été tués. Ce transfert intervient plus de quatre ans après l’ouverture de l’enquête en RDC par le Bureau du Procureur de la CPI.

De graves allégations de crimes

Un mandat d’arrêt avait été délivré sous scellés par la Chambre préliminaire I de la CPI à l’encontre de Germain Katanga, le 2 juillet 2007. Les scellés ont été levés le 18 octobre 2007. Le mandat d’arrêt retient contre lui neuf chefs d’inculpation, pour des crimes commis en Ituri, au nord-est du Congo, dont trois pour crimes contre l’humanité et six pour crimes de guerre, en relation avec son rôle dans des meurtres, des pillages, la réduction en esclavage sexuel, et l’utilisation d’enfants soldats pendant et après l’attaque du village de Bogoro, en février 2003. Selon la Chambre, il existe des motifs raisonnables de croire que l’attaque contre Bogoro a été lancée conjointement par la FRPI et le FNI dans le cadre d’une « attaque systématique et généralisée », dirigée contre des civils d’ethnie hema de ce village. Katanga n’est toutefois pas inculpé par la CPI pour d’autres graves allégations de crimes qui reposent sur lui. En effet, selon Human Rights Watch Katanga aurait également dirigé l’attaque contre l’hôpital de Nyakunde en septembre 2002, où des civils auraient été pris pour cible par ses combattants en raison de leur appartenance ethnique. Sa comparution initiale a eu lieu lundi 22 octobre 2007. Une audience est prévue pour le 28 février 2008 lors de laquelle le procureur présentera un résumé des preuves et les juges décideront si elles sont suffisantes pour commencer un procès contre Katanga. L’arrestation de Katanga survient après les poursuites engagées contre Thomas Lubanga Dyilo , le premier accusé de la Cour et ancien chef de l’Union des patriotes congolais (UPC). Lubanga est accusé d’avoir procédé à la conscription, au recrutement, et à l’utilisation d’enfants soldats pendant le conflit en Ituri. Le procès de Lubanga devrait commencer le 31 mars 2008 et sera le premier dans l’histoire de la CPI.

Rappel du contexte

Germain Katanga était un haut commandant militaire de la FRPI et du FNI, deux groupes armés étroitement liés et établis fin 2002 afin de promouvoir les intérêts de l’ethnie Lendu, l’une des principales ethnies de l’Ituri. Le FNI était principalement composé des Lendu du nord de l’Ituri, tandis que la FRPI comptait des ressortissants du groupe ethnique Ngiti, connus parfois comme les Lendu du sud. Katanga est Ngiti.

Sous la direction de Floribert Njabu, le FNI s’est joint provisoirement à la FRPI afin de lutter contre l’UPC, un groupe Hema que les Lendu considéraient comme leur ennemi. En 2004, suite à une lutte de pouvoir au sein de leur alliance, les deux groupes se sont séparés.

Toujours selon Human Right Watch, le FNI ainsi que la FRPI ont reçu des soutiens financiers et militaires de la part de l’Ouganda et, à partir de fin 2002, du gouvernement central à Kinshasa qui tentait de se trouver de nouveaux alliés dans l’est du Congo. Lors de leur occupation du Congo en 2003, les forces ougandaises ont mené des opérations militaires conjointes avec le FNI et la FRPI.

Krystel Lepresle, juriste spécialisée en droits de l’homme et droit international humanitaire.

date de publication : 19 novembre 2007

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